Depuis la rédaction de cet article, les décrets manquants ont été pris et publiés le 08/08/21 au Journal officiel - voir les actualités à l'accueil du site datées à partir du 08/08/21 pour la mise à jour des informations indiquées ici.
07/08/2021 Communiqué - Information (aux employeurs privés et publics, et exploitants des établissements) aux personnes concernées par le contrôle obligatoire d'un passe sanitaire que le Premier Ministre peut déclencher par Décret dans certains lieux nouveaux (ie accès habituel aux bars et restaurant, hôpitaux hors urgence...; pas de décret pour l'heure au JO du jour n°0182) - et bref rappel sur l'extension opérée par le Décret n°2021-955 du 19/07/21 -, et le contrôle de l'obligation vaccinale (incombant à certains professionnels) prévue par la Loi elle-même dès le lendemain de sa publication.
Eléments donnés à titre informatif afin de permettre aux personnes confrontées aux problèmes nés de cette législation excentrique - Loi n°2021-1040- (et manifestement anticonsitutionnelle sur de nombreux points) ou du Décret n°2021-955 du 19/07/21 qui peut être disproportionné suivant la situation sanitaire dans le territoire où se situe l'établissement, de faire valoir valablement leurs droits avec l'assistance d'un avocat de leur choix ensuite.
On peut dire que les pouvoirs publics vous ont fait un cadeau empoisonné.
S'agissant du contrôle du passe sanitaire:
Pour l'heure seuls les lieux visés par le décret n°2021-955 du 19/07/21 sont soumis au passe sanitaire, et ces lieux n'incluent pas les bars et restaurants dans leur accès public habituel (pour faire simple : seul l'accès inhabituel à la soirée spéciale, avec contrôle à l'entrée, pour l'élection de Miss plage 2021 réunissant plus de 50 personnes, est concerné, au café ou restaurant de votre station balnéaire préférée; ou l'accès inhabituel à la soirée spéciale "Loto d'été" dans votre café de village, si elle réunit plus de 50 personnes), ni les hôpitaux ou autres établissements de santé.
La Loi n°2021-1040 en son art 1er modifie la Loi n°2021-689 et instaure le principe d'un passe sanitaire possible dans le cadre de la vie quotidienne, applicable au public, et aux intervenants professionnels, de nombreux nouveaux établissements recevant du public; le passe sanitaire ne peut cependant entrer en vigueur dans ces nouveaux lieux sans un Décret du Premier Ministre visant ces nouveaux lieux, et répondant à certaines conditions.
Pour les salariés ou préposés concernés au titre du passe sanitaire, seules sont visées par la Loi "les personnes qui interviennent dans ces lieux, établissements, services ou évènements lorsque la gravité des risques de contamination en lien avec l’exercice des activités qui y sont pratiquées le justifie, au regard notamment de la densité de population observée ou prévue.".
Et, selon le paragraphe IV de l'article I de la Loi n°2021-689 modifiée intégrant le passe sanitaire, les mesures prises dans les Décrets du Premier Ministre concernant l'accès aux établissements, "doivent être strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il y est mis fin sans délai lorsqu’elles ne sont plus nécessaires.".
En l'absence de décret soumettant au passe sanitaire l'accès habituel aux établissements nouveaux visés dans la Loi comme les bars & restaurants ou les établissements médicaux ou assimilés, personne ne peut demander un pass à ce jour à l'entrée de ces lieux nouveaux. Quiconque se le voit imposer peut valablement mettre en jeu la responsabilité des exploitants et directeurs dedits lieux nouveaux.
En attendant les précisions du décret qui devra en tout état de cause tenir compte des limites posées dans la Loi ou pourra être contesté, pour faire simple:
-au café des sports qui fait 80m2 dans un village de 150 habitants dans la Creuse, en dehors de la période de fête du village ou en dehors de la soirée du Loto d'été, soit lorsqu'il n'y a jamais plus de 10 personnes en même temps dans le café, vous pouvez tranquillement considérer que la Loi n'a pas entendu prévoir d'obligation particulière pour les salariés de présenter quelque passe que ce soit, en dehors de la fête du village ou la soirée loto; et le dirigeant ne risque rien si il respecte cette philosophie.
-concernant les établissements médicaux ou assimilés, la problématique est moins simple car il s'agit bien entendu d'éviter la contamination de personnes qui viennent dans ces établissements pour des soins, ou y vivent en tant que personne fragile.
Quoi qu'il en soit personne ne peut imposer une obligation non prévue par la Loi, et en l'absence de Décret, il n'y a pas d'obligation légale de passe sanitaire dans ces lieux, il ne peut être exigé, à défaut, la responsabilité des dirigeants peut être engagée. Par contre les personnes souhaitant accéder à ces établissements doivent porter le masque requis le cas échéant, et utiliser le gel, et respecter les règles de distanciation imposées.
Ensuite, dès lors qu'il n'y a aucune garantie qu'une personne vaccinée ne porte pas le virus, le passe sanitaire tel qu'il est conçu aujourd'hui, à tort comme un bon point pour des bons élèves vaccinés, ne permet pas d'atteindre valablement le but recherché : en cela il est inconstitutionnel, si on porte un regard objectif sur ce dispositif et sans complaisance. Il n'est pas le dispositif adapté pour empêcher que le covid19 soit une maladie nosocomiale; il n'est pas plus le dispositif adapté pour éviter assurément la non transmission dans les lieux à public dense ou activité particulièrement propice à transmission; et les directeurs d'établissements ne sont donc absolument pas protégés juridiquement par le dispositif tel qu'il est conçu. C'est un leurre.
Enfin sur le passe sanitaire, dès publication du ou des décrets, si quiconque tente d'obliger à présenter un pass dans le café du village de la Creuse hors densité particulière, tel que précité, voire à obliger à vaccination un salarié dans le dit café, il engagera sa responsabilité.
Et il est nécessaire de vérifier la situation du territoire où se situe le bar ou le restaurant quel qu'il soit en dehors de cet exemple : si la situation sanitaire dans ce territoire ne le justifie pas, toute personne pourra contester en Justice comme demander une indemnisation, si un passe sanitaire lui est demandé, et encore pire, si on tente de lui imposer une vaccination. La responsabilité des établissements et dirigeants pourra être engagée.
Par ailleurs la Loi n°2021-1040 en son article 12 prévoit, pour les soignants et professionnels de santé ainsi que certains professionnels de la sécurité civile, l'obligation de vaccination, sauf contre-indication, ou bien par dérogation jusqu'au 14/09/21 l'obligation de présentation d'un test virologique; cette disposition porte une obligation vaccinale qui elle, est entrée en vigueur aujourd'hui, tel que prévu expressément par la Loi, cependant en l'absence des décrets d'application prévus vous pouvez cependant tenter de gagner quelques jours sur la base de cette absence, mais c'est plus risqué car ici, le Décret n'est pas une condition de légalité, il a seulement une vocation de précision applicative.
Quoi qu'il en soit, les décrets qui manqueraient encore seront pris, le Gouvernement et le Président de la République ne semblent pas décidés à retirer les dispositifs contestés dont celui-ci. On ne cache pas que le bataille va être plus rude pour défendre les droits de ces professionnels et devra peut-être allée jusqu'à la Cour Européenne des droits de l'Homme, mais les juristes sont là pour ça. Et considérant notamment le fait que les vaccins sont nouveaux et en AMM conditionnelles, cet argument supplémentaire peut être utilisé par les avocats qui défendront en Justice et peut-être jusqu'à cette Cour, ceux d'entre eux qui ne souhaitent pas subir une vaccination forcée notamment pour cette raison. Si quiconque veut les obliger à vaccination, a fortiori sous chantage d'interdiction d'exercer avec suspension de salaire, et encore pire (nous sommes parvenus à inspirer cette alternative pour les salariés privés ou agents publics non soumis à obligation vaccinale mais soumis à mise à pied de la même façon, elle peut peut-être fonder un argument dans un recours, sur le fondement de l'égalité) sans proposer une affectation temporaire sur un autre poste si c'est possible ni même l'envisager, est susceptible de voir sa responsabilité engagée.
Il faut également rappeler le manque de pertinence d'un tel dispositif en ce moment, qui a provoqué une réaction naturellement vive des soignants et autres professionnels de santé ou de sécurité civile concernés, naturellement face à la brutalité qu'ils ont subie, et qui sont extrêmement précieux et nécessaires pour lutter contre l'épidémie.
En conclusion, encore une fois, nous comprenons parfaitement que la situatoin puisse être complexe, et qu'il faille trouver des solutions; les solutions, c'est précisément le métier des Juristes. Mais ces dispositifs sont non seulement inadaptés à la situation, ils sont aussi inefficaces, comme ils sont d'une violence inouïe, et ils ont braqué les Citoyens les uns contre les autres. Nous ne pouvons pas contrer des atteintes aussi graves portées aux droits des gens, sans la défense de leurs droits en Justice lorsque cela sera nécessaire.
Ce que nous pouvons vous recommander, à vous, employeurs ou exploitants, qui êtes, pour la très grande majorité (en dehors du milieu médical, et des organisations prétendues représentatives des intérêts des entreprises ou des soignants voire certaines organisations de salariés, apparemment en grande partie co-responsables de ce désastre), autant victimes que le public et les salariés et agents ou soignants et assimilés visés, de cette situation désastreuse: veiller scrupuleusement à ne pas exiger des contraintes non prévues, en d'autres termes ne faites pas de zèle, ni de forcing sur la vaccination car cela pourrait être lourdement sanctionné, et gardez à l'esprit que ni le passe sanitaire tel que conçu, ni l'obligation vaccinale, ne vous protège assurément en terme de responsabilité juridique en cas de contamination dans votre établissement, contrairement à ce qui vous a manifestement été vendu.
Nous pouvons aussi vous recommander (en dehors de ceux responsables de ce désastre, qui n'ont toujours pas compris à quel point ils sont dans l'erreur, et persistent), si vous êtes sensibles au sort très injuste, pour peu d'efficacité en définitive face au but recherché, qui est imposé à vos clients, usagers, et préposés: vous allier, avec eux, dans la démarche qui vise à revoir complètement ces dispositifs, qui doivent être retirés, le plus vite possible.
Et cela ne peut advenir désormais, que par la main du juge. Des actions conjointes peuvent être menées. Vous n'êtes pas obligés de vous affronter, vous pouvez vous allier.
Rien (pour le moment...) ne l'interdit.
Fédération des Juristes de France
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